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Alexandre DUVAL-STALLA
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26 avril 2010

Les trésors de la collection Vollard sortis du coffre

7add7e9a_5139_11df_8c5f_e8387db7a0bcIl n'y a pas plus mythique que le nom d'Ambroise Vollard. Ce célèbre négociant de tableaux a révélé ­Gauguin, Picasso, Matisse, Derain, Van Gogh ou Cézanne, dont il organisa la première rétrospective. Bravo à ­Sotheby's qui a décroché la vente de 140 œuvres ayant appartenu à ce légendaire marchand, auquel le Musée d'Orsay, le Met (Metropolitan museum of Art) à New York et l'Art Institute de Chicago ont rendu hommage, en 2006 et 2007.Depuis sa mort en 1939, tableaux, gravures, dessins et photographies d'artistes clés de l'avant-garde de la fin du XIXe et du début du XXe siècle dormaient dans un coffre.

Les voilà en vente pour créer l'événement, le 29 juin prochain, à Paris. Seul, un tableau fauve d'André Derain, peint en 1905, partira à Londres pour être la pièce phare d'une dispersion impressionniste et moderne, le 22 juin, avec une estimation de 9 millions à 14 millions de livres (10 à 15 millions d'euros). Très exceptionnel, ce paysage inédit de Collioure, où l'artiste séjourne avec Matisse, est visible, dès aujourd'hui et jusqu'à demain à la galerie Charpentier *. Posée sur son chevalet, cette toile qui, fait rarissime, n'a jamais été vernie, laisse éclater ses fraîches et éclatantes couleurs. «Le fauvisme a été pour nous l'épreuve du feu. Les couleurs devenaient des cartouches de dynamite, elles devaient décharger de la lumière», disait Derain. L'huile a-t-elle figuré au Salon d'automne, en octobre 1905, dans la salle qui entrera dans les livres sous le nom de «Cage aux fauves», aux côtés de Vlaminck et Marquet? C'est possible, mais rien ne le prouve.

L'histoire de ces trésors cachés pendant plus de quarante ans est magique. Cette vente est le dénouement d'une incroyable aventure à rebonds. Peu après la mort de Vollard dans un accident de voiture en 1939, Erich ­Slomovic, un jeune Yougoslave collaborateur du marchand, déposa un ensemble d'œuvres que celui-ci lui avait confiées dans un coffre de la Société générale à Paris. Mais en mars 1940, en pleine guerre, Slomovic quitte précipitamment la France avec les membres de l'ambassade de Yougoslavie, emportant d'autres tableaux: environ 400 œuvres qui sont exposées à Zagreb en novembre 1940 et pour beaucoup sont encore conservées au Musée national de Belgrade.

Erich Slomovic est arrêté par les nazis et meurt en déportation en 1942, à l'âge de 27 ans. Personne ne connaissant l'existence du coffre, son contenu est resté insoupçonné pendant quarante ans. C'est seulement le 21 mars 1979 que la banque procède à son ouverture, suivie d'un inventaire. Pour payer les frais de garde de la chambre forte, une vente est envisagée. Deux commissaires-priseurs, Lenormand et Dayen, sont mandatés par la banque pour faire une vente à Drouot, en mars 1981. «C'est à ce moment-là, explique ­Thomas Bompart de Sotheby's, que les ayants droit d'Ambroise Vollard ont découvert l'existence de cette collection qu'ils ont revendiquée.» Et ceux de ­Slomovic aussi.

«Mon raseur sympathique»

Après maints rebondissements, l'affaire va jusqu'en Cour de cassation. C'est un cas d'école en matière de droit de propriété. Et la vente est annulée. À l'époque, un catalogue avait été imprimé. Celui-ci comprenait le fameux ­Derain, mais aussi l'historique portrait de Zola, alors très jeune, peint vers 1862-1864 par son camarade de classe Paul Cézanne (estimation de 500 000 à 800 000 euros). Ou encore une épreuve de 1904 du Repas frugal de Picasso dans un état extraordinaire (250 000 à 400 000 euros), un remarquable monotype d'Edgar Degas, La Fête de la patronne, exécuté en 1878-1879 (200 000 à 300 000 €) et un autoportrait de Renoir dédicacé par l'artiste à «Ambroise Vollard, mon raseur sympathique». Selon Thomas Bompard, «cet ensemble est un hommage à l'éclectisme de Vollard qui mettait la même passion à acheter le premier atelier d'André Derain qu'à éditer une belle lithographie d'Henri-Edmond Cross. Jusqu'au bout, il eut des goûts avant-gardistes en achetant même un portrait de Man Ray».

Source : Le Figaro http://www.lefigaro.fr/culture/2010/04/25/03004-20100425ARTFIG00249-les-tresors-de-la-collection-vollard-sortis-du-coffre-.php

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